Michael Mann a trouvé les mots justes en entrant sur la scène de l’Institut Lumière, dans une salle comble prête à chavirer: “Pure.” Un souffle, une mesure, une note bleue tenue. À 80 ans, le cinéaste de Chicago a reçu le 17e Prix Lumière, sous les applaudissements d’une assemblée où se mêlaient étudiants, techniciens, retraités cinéphiles du Grand Lyon et invités prestigieux. Isabelle Huppert, lauréate l’an dernier, lui a remis la distinction; Thierry Frémaux a orchestré la soirée; Camélia Jordana a repris “We Shall Overcome”, comme un trait d’union entre la scène et l’écran. Et soudain, la Ville de Lyon, berceau du cinéma, s’est mise au diapason de ce maestro des métropoles nocturnes.
Ce festival a cette élégance rare: pas de compétition, mais une mise en commun. Des montages ont salué l’histoire du 7e art, celle de la manifestation et l’itinéraire du réalisateur de Heat, Ali, Révélations et Collatéral. On y a redécouvert un humaniste dont la filmographie, certes peuplée de criminels et de flics au bord du gouffre, parle en creux d’éthique, d’amour du travail bien fait et de solitude habitée. Les images de la semaine resteront: la modestie amusée de Mann, son regard pétillant, et cette reconnaissance adressée à tous ceux qui s’assoient côte à côte devant un grand écran. Une évidence rappelée avec grâce: le cinéma, ici, se partage.
En bref
- Michael Mann sacré 17e Prix Lumière à l’Institut Lumière, au cœur de la Ville de Lyon.
- Une cérémonie emmenée par Thierry Frémaux, avec Isabelle Huppert et une performance de Camélia Jordana.
- Un festival sans compétition, pensé pour fédérer le public du Grand Lyon et d’ailleurs.
- Un hommage au “bâtisseur de villes” dont les films résonnent par leur humanisme discret.
- Rétrospective nationale coordonnée par l’ADRC et partenariats avec Pathé, France Télévisions, Arte, Le Monde, Télérama et le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée).
Sommaire
ToggleFestival Lumière 2025 à Lyon : Michael Mann, 17e Prix Lumière et une soirée “Pure”
Dans l’amphithéâtre, l’émotion a précédé le protocole. Isabelle Huppert a glissé quelques mots sensibles sur l’art de l’ellipse et le sens de la tension chez Mann, quand Thierry Frémaux, passeur de mémoire, a rappelé la vocation du festival: rassembler. La chanson de Camélia Jordana a transformé l’hommage en moment choral, avant que le lauréat, un rien pudique, n’offre ce verdict limpide sur sa semaine lyonnaise: “Pure”. Photos signées Pierre Ferrandis et Simon Beauchamps en témoignent.
- Moments signatures: remise du prix, reprise de “We Shall Overcome”, salve d’extraits projetés sur écran géant.
- Valeurs affichées: transmission, modestie, joie collective — à rebours du culte du classement.
- Échos dans la salle: une ferveur partagée, du premier balcon aux rangs de journalistes.
Pour prolonger cette soirée et ses échos critiques, le programme détaillé circule encore, notamment via le programme détaillé de l’hommage à Michael Mann, qui jalonne projections et rencontres autour de l’œuvre.
En filigrane, cette cérémonie rappelle une chose simple: l’art de Mann est moins un glaçon qu’une braise.
Michael Mann au Festival Lumière : l’architecte des nuits urbaines dévoilé
On croit connaître Mann pour ses fusillades chorales et ses plans de bitume luisant. La rétrospective démonte cette recette supposée pour révéler une “architecture souterraine”: des trajectoires parallèles, l’obsession du détail, des vies intérieures captées à travers la texture d’une ville. À l’écran, la métropole n’est pas décor; c’est un partenaire de jeu, un organisme qui respire à l’unisson des personnages.
- Films-phare revisités: Thief, Manhunter, Heat, Collatéral, Miami Vice et Révélations.
- Thèmes récurrents: sens du rituel professionnel, solitude active, loyautés contrariées.
- Signature visuelle: nuit électrique, horizon industriel, précision sonore quasi documentaire.
Dans la salle, un étudiant me confie qu’il n’avait vu de Heat que la scène du braquage; il découvre une histoire d’amour contrariée par la vocation. C’est l’effet Lumière: on revoit, on réentend, on réapprend.
Et maintenant? L’adaptation annoncée de Heat 2 promet d’élargir la cartographie émotionnelle qu’il trace depuis Chicago jusqu’aux rivages du mythe.
Mise en scène à l’Institut Lumière : la ville comme partenaire de jeu
Le montage projeté à l’Institut Lumière insistait sur la manière dont Mann sculpte l’espace: angles précis, lignes fuyantes, horizon électrique. Chaque plan est un pacte entre une conscience au travail et une topographie urbaine qui la reflète. On n’y marche pas: on y trace.
- Caméra au cordeau: vitesse maîtrisée, horizons nets, respiration sur le silence.
- Lumière expressive: néons, sodium, aube métallique — une palette affective plus que chromatique.
- Sonorités d’acier: prises directes, balles sèches, moteurs rauques qui font avancer la dramaturgie.
Résultat: l’action n’est plus simplement spectaculaire, elle devient une grammaire morale.
Jeu des acteurs : le feu sous la glace, de De Niro à Foxx
Chez Mann, l’interprète ne “joue” pas, il “procède”. De Niro et Pacino carburent à l’ellipse, Jamie Foxx se tend comme une lame, Colin Farrell camoufle la fêlure sous les Ray-Ban. La méthode: gestes précis, vocabulaire professionnel, regard qui absorbe d’abord, répond ensuite.
- Direction minimaliste: peu de mots, beaucoup de préparation et d’actions concrètes.
- Création de mythes: affrontements silencieux, codes d’honneur, chocs de solitudes.
- Effet sur le public: empathie par la compétence, pas par la confession.
On sort avec l’impression d’avoir observé des vies, pas des rôles — la plus belle des illusions de cinéma.
Pourquoi le Festival Lumière à Lyon fait école : un modèle de partage
Le Festival Lumière persiste et signe: ici, pas de palmarès, mais des regards qui se rencontrent. Soutenu par la Ville de Lyon et les collectivités du Grand Lyon, la manifestation embrasse la salle comme horizon. Les partenaires suivent: Pathé pour faire tourner les lampes, France Télévisions, Arte, Le Monde et Télérama pour relayer les œuvres; le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée) pour accompagner la circulation des copies; LCL (Le Crédit Lyonnais) pour la logistique visible sur les frontons.
- Un principe simple: la cinéphilie comme conversation, pas comme compétition.
- Un territoire engagé: salles Pathé, cinémas de quartier, institutions en réseau.
- Un public pluriel: scolaires, professionnels, curieux — tous réunis devant de grands écrans.
À Lyon, l’histoire s’écrit au présent: le geste Lumière, c’est de faire communauté.
Entre la naissance du cinéma et sa transmission, on trouve ici un fil tendu qui ne casse pas.
Voir ou revoir Michael Mann après la cérémonie : la rétrospective ADRC partout en France
La fête continue hors de Lyon: l’ADRC orchestre une rétrospective nationale pour remettre sur grand écran l’intégrale Mann. De Pathé Bellecour aux cinémas indépendants, de nombreux lieux reprogramment ses classiques, suivis de débats et de séances animées. Parfait pour réviser la discographie nocturne avant Heat 2.
- Incontournables à (re)découvrir: Thief en copie restaurée, Heat en 35 mm si possible, Collatéral pour Los Angeles by night, Révélations pour l’éthique sous pression.
- Où chercher: réseaux Pathé, cinémathèques régionales, agenda de l’Institut Lumière et annonces soutenues par le CNC.
- Pour prolonger: masterclass enregistrées, podcasts partenaires, articles de référence dans la presse culturelle.
Pour compléter votre parcours, feuilletez quatre films incontournables à découvrir ce week-end, faites un crochet par un rappel précieux sur l’héritage de François Truffaut et embarquez pour un voyage cinématographique en terrain de road‑movie. Côté actu, surveillez le dernier thriller de Mark Wahlberg et, si l’appel du canapé vous titille, ne manquez pas ce chef‑d’œuvre d’action à voir vite sur Netflix.
- À suivre aussi: cinq incontournables au cinéma ce week-end, nos recommandations du mercredi et un détour par Premiers Plans d’Angers.
- Pour replonger dans l’hommage, consultez le programme détaillé de l’hommage à Michael Mann et organisez vos prochaines séances.
En salle, on guette le moment où les lumières se baissent: avec Mann, chaque plan remet le monde à l’endroit.