Sucker Punch
de Zack Snyder
avec Emily Browning, Abbie Cornish, Jena Malone et Vanessa Hudgens
Etats-Unis – 2011 – 1h50
Rating:
Une nana, un beau père incestueux, un asile psychiatrique, un bordel, des putes, des nazis, des dragons, des robots, des samouraïs géants, des minijupes, des flingues… C’est dans cet univers là que Zack Snyder, réalisateur de 300, Watchmen et de L’Armée des morts nous sert son film le plus fou et en même temps le plus personnel qu’il ait pu faire depuis le début de sa carrière.
Je vais essayer de mettre des mots sur le pourquoi, tout en essayant de vous convaincre d’aller le voir. Parce qu’après tout, c’est ça, écrire sur un film qu’on aime, et ce film, malgré quelques petits défauts, je l’aime de tout mon cœur.
Le première raison de cet amour, est évidemment, ce que je cherche et qu’on cherche tous ici à Celluloïdz, l’originalité. Et je ne parle même pas du traitement ou de la forme, mais juste du fait que ce n’est pas une adaptation ou une suite, tout en étant un blockbuster, ce qui est assez rare dans le paysage cinématographique actuel pour être relevé. Ses précédents films d’ailleurs étaient, malgré leur originalité dans la forme, des adaptations ou des remakes.
Ici, dans une histoire inspirée vaguement d’Alice au Pays des Merveilles, le réalisateur/scénariste nous sert une histoire avec plein d’histoires rêvées dedans. Ici s’arrête la comparaison, car cette histoire d’une fille qui s’échappe de sa réalité infernale dans une autre réalité infernale (mais plus marquée symboliquement) puis dans d’autres réalités où pour le coup, elle dame le pion de ses ennemis à grands coups de pieds et de bazooka, est une bête tout autre que le livre de Caroll.
Je pense qu’il est temps de vous raconter dans les grandes lignes de quoi parle le film si vous voulez comprendre ce qui suit.
Une fille est mise dans un hôpital psychiatrique par son beau père tyrannique qui achète un des gardiens pour qu’il la lobotomise. Dans ce lieu, notre héroïne, Baby Doll s’échappe, par la pensée, dans un bordel où vivent toutes les filles de l’hôpital sous la coupe d’hommes pervers, vicieux et simplifiés à des clichés (le film d’ailleurs jouera tout du long de beaucoup de clichés, on y reviendra). Ainsi, le père devient un curé, le gardien de l’asile, un proxénète, le mec sensé la lobotomiser, un riche client qui va venir la dépuceler, le gros cuisinier dégueulasse, un gros cuisinier dégueulasse etc.
C’est dans cette ambiance que démarre ce film castrateur et survolté. Car afin de s’évader de ce lieu, donc de l’asile, Baby Doll danse. Elle danse pour tous les mecs qui peuvent lui procurer un objet menant à l’évasion, les laissant béats et fascinés par ses mouvements. Mouvements qu’on ne verra jamais, car au lieu de filmer cette danse, Snyder nous envoie dans un troisième étage de l’imagination, celui de la baston, la bonne vieille bagarre sublimée par la caméra du bonhomme.
Les scènes d’action du film ne sont pas banales, car elles plantent chacune un décor différent, voire un genre différent. Nous passons donc du film de guerre au film de samouraïs, du film de science fiction au film de dragons. Mais pensez-vous vraiment après tout ce que je vous ai dit que Snyder va s’arrêter à ça ? Evidemment que non.
En plus de nous servir des scènes de genre, il ne s’arrête jamais dans l’hommage vieillot et emprunte à tous les médias, cinéma, jeux vidéos et manga compris, pour dynamiser tout ça en usant de plans vertigineux, de ralentis, d’accélérés, de plans séquences, en bref, tout ce qu’on peut faire avec une caméra, et en injectant des éléments anachroniques qui sont plus que les bienvenus : les nazis ne sont plus des nazis mais des nazis zombies mécaniques à vapeur qu’on bute à coup de mitraillette lourde et de robots, les samouraïs sont maintenant des géants métalliques blindés, armés jusqu’au dents, qu’on dézingue à coups de bastauce. C’est bourrin, c’est jouissif, et la musique, habile mélange de compositions originales et de reprises de morceaux emblématiques, rajoute encore une couche à ce joyeux bordel où ces femmes s’en donnent à cœur joie à démonter systématiquement la gueule des mecs qui leurs font la misère.
Entre ces scènes, le film respire, et l’histoire se construit, avance, dans cet univers singulier, feutré et sans pitié qui nous sert de décor, jusqu’au dénouement, surprenant mais pourtant naturel, couillu comme c’est pas permis dans un film tel que celui ci. C’est déroutant, et même si une dernière grosse scène d’action aurait été la bienvenue, ça reste une fin vraiment classe.
En guise de conclusion, je vais parler de moi un peu. Je me disais récemment que les films avaient pris un mauvais tournant quelque part, pas tous évidemment, mais le cinéma d’action intelligent du moins, a morflé, car plus jamais nous n’aurons de films funs ET violents ET cyniques ET sexys comme Robocop, L’Arme Fatale, Conan le Barbare, et beaucoup d’autres films qui pouvaient se targuer d’être intelligents sans « jouer aux malins », sans se foutre de notre gueule, sans dire « regarde, je t’ai bien eu avec mon twist final, hahahaha, je suis un jeune réalisateur de 28 ans et j’aime mener mes spectateurs par le bout de la bite », tout en restant cash, authentiques.
La plupart de ces films sont en cours ou vont sûrement faire l’œuvre de remakes, je ne vois pas qui pourrait faire revivre ce cinéma. Puis j’ai pensé à Snyder, et quelques jours après, j’ai vu Sucker Punch, et c’est exactement ça. Un film riche, dense, fou, violent et quelque part qui paraît naïf mais ne l’est absolument pas, le film d’un cinéaste qui aime son art et qui se réfugie dedans, s’en servant à l’instar de son héroïne, comme d’un échappatoire à un monde ou un cinéma merdique, d’un cinéaste qui aime s’éclater, amuser et qui nous offre la fraicheur de son imagination et les images de son esprit.
Merci.
Skreemer
Mouais.
Vu la filmo du monsieur, le manifeste féministe à base de putes en bas résille je n’y crois pas du tout (Sin City s’en sort bien mieux). Mais bravo à Mr 300 s’il arrive à vous faire voir un quelconque message dans ce fatras décousu de blue screen, ralentis cheap et mauvaises reprises overdrivées. On dirait un DVD de démo pour téléviseurs next gen. D’ailleurs je me demande si je n’avais pas déjà vu la scène du dragon chez Darty…
Bref, là où vous voyez du génie et des cojones, je vois seulement un geek complexé qui met ses fantasmes en images en repompant allègrement et sans grand talent ses films préférés (qui sont sans doute les mêmes que les miens). Alors en sortant de Darty, pardon, du ciné, regardez ou revoyez sur votre nouvelle télé Casshern (flagrant), Captain Sky and the world of tomorrow (pour les dirigeables steampunk), les Seigneur des Anneaux (pour les décors gothiques, et les vilains orcs), les films des frères Watchowski (Speedracer notamment) ou même Scott Pilgrim, qui lui au moins était original et fun à défaut d’avoir un scénario. Le fun, c’est ce qui aurait pu tout sauver à mes yeux. Hélas des dialogues aussi mal écrits que mal joués et un final pompeux ont écarté tout doute quant à la présence d’un hypothétique second degré.
Maintenant pour être tout à fait honnête j’ai tout de même apprécié certains détails du film. Les miroirs omniprésents (merci Shining et Black Swan) et le fait que la caméra les traverse, avec plus ou moins de subtilité. La scène d’intro et dans l’ensemble les premières minutes du film m’ont vraiment scotché. La scène des samouraïs était sympathique…. Et puis… Piste 2: on recommence avec des zombies à vapeur, et l’amusement cède vite la place à l’ennui. Sic.
Sa réalisation très stylisée peut taper sur le système, tout comme elle peut fasciner, elle n’en reste pas moins construite et riche. Comme tout réalisateur geek qui se respecte, Snyder cite effectivement des références marquantes de cette culture, afin d’enrichir son univers visuel, Snyder n’ayant jamais cherché à se définir autrement que comme un cinéaste de la forme, et décomplexé de surcroît. Aussi naïf et discutable puisse t-il paraître, Sucker Punch tient tout de même un discours et reste dans la lignée d’un des thèmes de prédilection de Snyder, la survie par le combat, dont le réal maîtrise quand même la mise en scène. Enfin, il faut reconnaître que Zack Snyder est vraiment le genre de réal qui ne laisse jamais indifférent. Que tu adores ou que tu détestes, tu ne sors jamais d’un de ses films sans avoir une opinion tranchée….
Ses films sont stylisés comme le tuning stylise une voiture. Un triple aileron géant, des néons mauves et des jantes 40″? Certains y voient du talent et de l’art, d’autres non. Certes Snyder maîtrise la mise en scène du film de baston (sans la révolutionner, il met juste des plus grosses jantes) mais dans leur genre Le Transporteur et Fast & Furious remplissent aussi parfaitement leur cahier des charges. Cela en fait-il des chefs d’oeuvre à cinq étoiles pour autant ?
Pour le dernier point selon lequel Snyder ne laisse personne indifférent, je pense que ça dépend aussi des gens, certains comme vous et moi adorent détester 😉 Je n’aime pas du tout 300 non plus (son autre film instantanément ringard qui durerait 25 minutes si on passait les ralentis à vitesse réelle) mais Watchmen m’a laissé une impression bien plus mitigée, surement parce que l’ambiance et le scénario sont canon (ah tiens, c’est une adaptation…).
Zack Snyder nous offrira beaucoup mieux que Sucker Punch, pourtant Suker Punch est très bon.
Pour Tom: Oui The Watchmen est quelques crans au dessus, mais réduire Zack a du tuning, c’est taper fort ? non c’est taper injustement. Le genre de Sucker Punch n’existe pas, en dehors de quelques films qui demanderaient une plongée sous la poussière, en gros faut creuser. Le film se place entre ambition et prétexte, mais dieu que l’ambition est forte. Les références pullules, et jamais on ne se sent trahis, il n’y a qu’a se laisser guider. Esthétiquement irréprochable. La narration qui ne se veut pas subtile est plus que correcte, la BO est travaillé même si un ton en dessous de ce que The Watchmen était doté. Le seul vrai point faible du film sont sans doute les acteurs. Scott Glenn, Carla Gugino sont un cran au dessus, Jena Malone s’en sort pas trop mal, le cuisto, le maire, le « lobotomiseur » sont très bon. En revanche le premier rôle est ses acolytes ça n’envoient pas grand chose. Tant pis faudra s’en contenter. Pour le plagiat, je suis mitigé. Une accusation qui revient souvent pour beaucoup de film et qui n’est généralement pas valable. Un peu comme si on avait rien à balancer alors : plagiat! (je ne t’accuse pas de l’utiliser ainsi, mais c’était flagrant pour Avatar(et d’autres films) de la part de la presse (et bien d’autres encore), et comme en règle général ça ne marche pas, le mieux à faire c’est de ne pas s’en servir)
Pour 300, je trouve que tu es à coté. Le projet était de restituer la BD et ce sera difficile de faire mieux. Si un réal se sent le courage, qu’il ne se gène pas.
Pour Skreemer : pour la violence je ne suis qu’à un tiers d’accord. J’ai lu par le passé deux auteurs un de BD et un de littérature fantasy qui évoquait le sujet. Pour ces deux auteurs la violence accentuée(survitaminé, supra ultra) n’est plus vraiment de la violence, juste une action qui sert tout un tas d’objectif autre que montrer la violence. Pour moi c’est un outil (ici,esthétique).Sucker Punch a l’exception de la scène d’ouverture et la fin du film n’est pas particulièrement violent, ni gore,ni crue et pas sexy. Je dirais même qu’il y a une volonté a éviter tout ça. On peut se sentir piégé par les jeunes personnages, le bordel, quelques tenues de scènes et des minijupes, mais c’est juste un piège, le film n’est pas sexy.
Pour le fun, on notera que les robots du train ont les mêmes mouvements que ceux de I.Robot. Plus un recyclage qu’un plagiat, ça m’a amusé.
Le futur de Zack c’est Superman, ça devrait faire des rentrées d’argent pour financer un projet plus libre. Wait and see 🙂