De Dominique Rocher
Avec Anders Danielsen Lie, Denis Lavant, Goldshifteh Farahani
France – 2018 – 1h34
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Sam se rend chez son ex pour récupérer de vieilles cassettes mais tombe en pleine soirée. Buvant quelques verres, il s’enferme dans une chambre et s’endort. A son réveil, il trouve l’appart vide et repeint à l’hémoglobine, découvrant vite que les zombies ont envahi Paris et qu’il est le dernier survivant.
Pour son premier long, Dominique Rocher se tourne vers le film de zombies, un genre, entre Goal of the dead et La Horde (sans aller remonter jusqu’à Jean Rollin…), pas totalement déserté par le cinéma français. Le jeune réalisateur se démarque du fun de ces prédécesseurs via une approche plus premier degrés, moins référentiel (même s’il est permis de penser à 28 jours plus tard, à REC ou à l’incontournable trilogie de Romero). En suivant au plus près la survie d’un homme coincé dans un immeuble parisien, Dominique Rocher nous livre un pur récit de naufragé solitaire, nous rappelant que le zombie n’est pas que la chair à actionner à laquelle il est souvent réduit aujourd’hui. La nuit a dévoré le monde, par cette description du quotidien d’un survivant seul face aux morts vivants, s’impose comme une véritable adaptation du classique séminale, le roman qui inspira Romero, Je suis une légende de Richard Matheson, une adaptation libre, certes, mais certainement plus fidèle et assurément plus convaincante que le bidule avec Will Smith.
Le personnage restant confiné dans son immeuble, le film se montre beaucoup épuré que le roman de Matheson. Outre une brève rencontre avec un chat (se substituant au chien de Je suis une légende), notre Robinson pourra compter sur son Vendredi (ou son Wilson, au choix), ici un zombie silencieux coincé dans l’ascenseur incarné par un forcément génial Denis Lavant. Si notre héros finit par se révéler peu à peu, au gré de quelques numéros musicaux, il reste malgré tout un peu fade, pâtissant d’une introduction quelconque, Anders Danielsen Lie ne parvenant pas toujours à lui donner plus d’épaisseur. On en vient même à se demander pourquoi ce norvégien exilé à Paris ne s’exprime jamais dans sa langue natale alors même qu’il parle tout seul ! Passé ce léger défaut empathique, La nuit a dévoré le monde est un film rondement mené, bénéficiant d’une mise en scène soignée aussi bien à niveau de l’image que du son. Aussi, malgré son huis clos et son minimalisme revendiqué, Dominique Rocher nous gratifie de quelques belles visions d’un Paris apocalyptique plongé dans un lourd silence et, que les fans de zombies se rassurent, quelques séquences de tension bien foutues.
Sans révolutionner le genre, La nuit a dévoré le monde reste un film revivifiant en montrant qu’on peut construire une oeuvre aussi solide en s’en remettant ainsi à ses principes les plus basiques, omettant même logiquement d’expliquer les origines de l’invasion pour mieux préserver tout le mystère du bon vieux zombie qu’on aime. Ça vaut quand même largement mieux qu’un Walking Dead… et c’est du made in France !
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