Carrie
De Brian De Palma
Avec Sissy Spacek, Piper Laurie, Amy Irving, John Travolta
Etats-Unis – 1976 – 1h38
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Quand Carrie est publié en 1974, Stephen King est sans doute loin de se douter du succès qui l’attend avec ce premier roman, et surtout de la carrière des plus prolifiques qui en découlera. Cette première oeuvre narre l’histoire de Carrie White, jeune lycéenne mal dans sa peau et victime des moqueries des autres étudiantes. Là où le personnage se différencie vraiment, c’est dans l’apparition d’un attrait pour la télékinésie, celui-ci devenant rapidement incontrôlable. Deux ans après la sortie du roman, Brian De Palma accepte de réaliser son adaptation à l’écran pour ce qui deviendra rapidement un classique du genre.
Derrière son penchant pour le fantastique, Carrie au bal du diable décrit de manière bien plus rationnelle le mal être d’une jeune femme mise à l’écart de part son comportement ne rentrant pas dans une certaine norme, le thème de la télékinésie n’étant finalement relégué qu’au second plan puisque son importance se révèle moindre en dehors des dernières minutes du film. Ainsi, les deux premiers tiers du film sont davantage à comparer à un portrait assez critique des comportements humains, qu’il s’agisse de celui des autres lycéennes ou de la mère de Carrie elle-même, religieuse fanatique, à l’origine des maux de sa fille. Le symbolisme religieux est ainsi présent tout au long du film, notamment lors de la confrontation finale entre Carrie et sa mère via un plan on ne peut démonstratif. Concernant les passages devenu aujourd’hui cultes, on notera bien évidemment cette scène d’introduction débutant tel un métrage érotique et versant en quelques secondes dans un registre bien différent, les effets de camera ajoutant soudainement un malaise pesant et cette introduction définissant dès le départ la tournure que vont connaître les événements. Grâce à sa réalisation virtuose, De Palma parvient à décrire les états d’âme de son héroïne uniquement grâce à des plans traduisant ses sentiments intérieurs. Malgré l’omniprésence du personnage de Carrie, les seconds rôles ne sont pas pour autant mis à l’écart et s’il y a bien l’un d’entre eux qui possède une importance majeure dans la manière dont Carrie va évoluer au cours du récit, c’est bien celui de Miss Collins, la professeur de sport qui va, en quelque sorte, tenir un rôle de seconde mère. Si son personnage reste le seul à tenter de protéger Carrie, il est aussi celui qui souhaite lui ouvrir les yeux et lui faire prendre conscience de sa situation.
De Palma soigne son travail et n’hésite pas à expérimenter. Certaines séquences sont réalisées avec brio, qu’il s’agisse de la scène de danse entre Carrie et Tommy Ross qui parvient à réellement donner le tournis ou encore la fameuse scène du bal où le récit sombre brutalement dans l’horreur, avec notamment l’emploi du split screen qui permet de multiplier intelligemment les points de vue. Mais cette mise en scène talentueuse aurait été rapidement vaine sans la talent de Sissy Spacek dont l’une des plus grandes forces est la manière de dépeindre les émotions de son personnage, chaque sourire se détachant de ses lèvres ayant le même effet sur le spectateur tant il est difficile de ne pas avoir de l’empathie pour elle, le dernier tiers du film devenant ainsi encore plus effroyable. Les deux premiers tiers du film sont donc à voir comme une exposition minutieuse des personnages, permettant notamment d’éviter les clichés. Carrie au bal du diable reste un modèle en terme d’écriture de part la crédibilité apportée à son héroïne, apport indéniable lorsque vient la scène du bal. La partition de Pino Donaggio colle parfaitement au film, le thème principal « For the last time we’ll pray » décrivant parfaitement la tension montante.
Premier roman de Stephen King et première adaptation à l‘écran, on ne peut que regretter que toutes celles qui suivirent ne furent pas d’un tel niveau tant celle offerte par De Palma reste un chef d’œuvre intemporel. Le film connu une suite médiocre et le remake à venir sous la direction de Kimberly Peirce ne peut que rendre méfiant tant une relecture de l’œuvre risquerait de se vautrer dans les méandres du film d’horreur calibré pour ados, là où l’original ne sombre jamais dans le formatage. A noter qu’un remake a déjà été réalisé en 2002 pour la télévision. Carrie au bal du diable est donc à considérer à juste titre comme une œuvre phare du cinéma de genre des années 70, ses qualités d’écriture, d’interprétation et de mise en scène lui conférant son statut bien mérité de film culte.
Nico Darko
Et une nouvelle version (et non pas un remake) est prévu pour sortir au cinéma, aux USA, le 15 mars 2013, avec Chloe Grace Moretz dans le role principal.. ainsi que Julianne Moore
🙂